Une étude rétrospective robuste alerte sur le risque accru de mortalité et d’arythmie cardiaque lié à ce traitement. Dans un contexte passionnel et hautement médiatisé, l’utilisation d’hydroxychloroquine dans le traitement de la COVID-19 voit brutalement son avenir s’assombrir. Une vaste étude pharmaco-épidémiologique, publiée dans The Lancet1 [Lire], a évalué le profil risque/bénéfice de ce traitement à partir des données d’un registre international alimenté par plus de 600 hôpitaux sur 6 continents. Près de 100.000 patients, hospitalisés pour COVI-19 entre décembre 2019 et avril 2020, ont été inclus et répartis en 5 groupes selon leur traitement initié dans les 48h suivant le diagnostic par PCR : chloroquine (n=1868), chloroquine plus macrolide (n=3783), hydroxychloroquine (n=3016), hydroxychloroquine plus macrolide (n=6121), groupe contrôle ne prenant aucun de ces traitements (81.144). Environ 11% des patients sont décédés pendant la période d’étude. Les analyses ajustées ont montré que la mortalité était plus élevée dans les groupes traités, avec une augmentation de 33% (hydroxychloroquine seule)  à 44% (hydroxychloroquine associée à un macrolide) de la mortalité (voir les prédicteurs indépendants dans la Figure). De plus, comparés au groupe contrôle, les traitements étaient associés à un risque accru d’arythmie ventriculaire (risques relatifs variant de 2.4 pour l’hydroxychloroquine seule à 5.1 pour l’hydroxychloroquine associée à un macrolide, tous hautement significatifs).

Cette étude, bien menée par une équipe de Harvard Medical School, est la plus vaste publiée à ce jour. La méthodologie est appropriée et l’analyse fournit des preuves de validité interne (facteurs pronostiques de mortalité notamment). La gestion des facteurs de confusion est optimale (analyse complémentaire utilisant l’appariement sur les scores de propension) et convaincante (E-value). Mais cette étude reste observationnelle et son niveau de preuve ne peut être que limitée. De plus, les résultats ne peuvent pas être généralisés aux formes plus mineures de la COVID-19 notamment chez les patients non hospitalisés. Enfin, les causes de mortalités ne sont pas connues et les troubles du rythme cardiaque ne suffisent pas à expliquer l’excès de mortalité. D’où l’importance des essais randomisés en cours dont les résultats sont attendus avec impatience. En pratique, l’utilisation hors AMM d’hydroxychloroquine n’est plus compatible avec l’état actuel des connaissances. En France, le Haut Comité de Santé Publique a été saisie pour reconsidérer les règles dérogatoires de prescription.

        

1 Cet article a été retiré de la revue à la demande de 3 des auteurs (Lire). Ce retrait d’une rapidité exceptionnelle est du à l’incapacité des auteurs de fournir des preuves de validité des données sources (Surgisphere Corporation). Les résultats de l’étude avaient conduit l’OMS et les autorités françaises à demander l’arrêt des essais randomisés sur l’hydroxychloroquine. Plusieurs essais dont l’essai anglais RECOVERY ont récemment confirmé l’innefficacité et les risques potentiels de l’hydroxychloroquine dans la COVID-19.